Permis à 17 ans : les avis et conseils de gérants d'auto-école

Depuis le 1er janvier 2024, le permis de conduire est accessible aux jeunes à partir de 17 ans au lieu de 18 ans. Qu’en pensent les enseignants à la conduite en auto-école et surtout quels sont leurs conseils pour appréhender au mieux cette nouvelle mesure ?

Marine Madelmond
Auto-école en France.

L’ex-première ministre Elisabeth Borne l’avait annoncé en juin 2023 à l’occasion d’une interview accordée au média Brut. Il aura fallu attendre cinq mois avant que cette réforme soit officielle… Le 20 décembre 2023, le gouvernement a en effet publié un décret relatif à l’abaissement de l’âge d’obtention du permis de conduire (série B) à 17 ans.

Pour rappel, en France, l’âge minimum pour conduire seul une voiture était initialement de 18 ans. Seuls les élèves en conduite accompagnée peuvent passer le permis B à 17 ans en attendant toutefois leur majorité pour conduire seul.

Depuis le 1er janvier 2024, les jeunes ayant 17 ans révolus peuvent prendre le volant en autonomie dès l’obtention du précieux sésame !

Bon à savoir

L’obtention préalable du code de la route est toujours obligatoire. L’examen peut être réalisé à partir de 15 ans pour les apprentis inscrits en conduite accompagnée et dès 16 ans pour les autres formations.

Permis à 17 ans : qu’en pensent les gérants d'autos-écoles ?

Au sein de la profession, les avis sur cette réforme sont partagés. Pour Grégory Méraud, gérant de l’auto-école Green Street en région parisienne, l’abaissement de l’âge minimum pour passer le permis de conduire est une bonne chose pour les jeunes qui souhaitent se rendre à l'école ou au travail : « Je trouve ça bien, c’est une opportunité pour les jeunes de pouvoir conduire une voiture dès 17 ans, dans le cadre de leur alternance ou de leur premier travail. » À condition que les apprentis soient vraiment prêts à prendre la route en toute conscience ! « C’est une question de maturité et de formation. Si les jeunes sont bien formés et qu’on leur apprend les règles de la conduite, il n’y a pas de problème à ce qu’ils soient sur la route à 17 ans. On voit bien qu'il y a des incivilités venant d'automobilistes qui ont souvent leur permis depuis très longtemps. Ce n'est pas une question d'âge mais de prise de conscience, de civisme et de partage de la route. »

Pierre-Antoine Bonnamour, enseignant à la conduite à Annezin dans le Pas-de-Calais, est moins convaincu par cette réforme. Selon lui, l’abaissement de l’âge minimum pour conduire en autonomie pourrait engendrer plus d’accidents. « Selon les statistiques, les jeunes de 15 à 25 ans sont les plus touchés par des accidents mortels de la route », assure-t-il. Le formateur pointe aussi du doigt l’immaturité de certains apprentis à la conduite face à des situations problématiques. « Je pense qu’il pourrait y avoir une augmentation des délits de fuite en cas d’accidents. Quand on est jeune dans ces situations, on peut avoir peur et ne pas prendre ses responsabilités. »

Risques d’embouteillages à l’examen du permis de conduire

L’abaissement de l’âge minimum pour conduire seul une voiture est une aubaine pour de nombreux apprentis automobilistes en France, pressés d'obtenir leur passeport pour l'indépendance. Pour preuve, depuis le 1er janvier, les gérants constatent une augmentation des inscriptions pour passer l’examen de la conduite. Et il est plus que probable que la tendance soit la même dans toutes les autos-écoles ! « Depuis plusieurs semaines, j’ai plus de demandes, surtout venant de jeunes actuellement en conduite accompagnée qui souhaitent passer directement leur examen », souligne Grégory Méraud. Même constat dans le Nord. « J’ai eu des demandes dès le mois d’octobre 2023, avant même que le décret soit publié. À partir du 2 janvier 2024, des élèves en conduite accompagnée ont souhaité rompre leur formation pour s’inscrire à l’examen du permis. » Conséquence : des bouchons au centre d’examen alors qu’il faut déjà attendre plusieurs semaines, voire mois, pour obtenir un rendez-vous !

Attention à la précipitation

L'autre risque que présente la précipitation : l'échec à l'examen. Les deux formateurs rappellent qu’il est essentiel de prendre le temps d'aboutir sa formation. Passer trop tôt son examen, c'est risquer de le rater ou de ne pas être prêt pour rouler en toute autonomie !

Grégory Méraud et Pierre-Antoine Bonnamour s’accordent par ailleurs à dire que la formation en conduite accompagnée ne doit pas être mise de côté. Or c'est un effet que pourrait avoir l'avancement du permis à 17 ans. « C’est une mesure qui va à l’encontre de la promotion de la conduite accompagnée, et c’est malheureux d’avoir une baisse d’inscriptions pour cette formation. À cause de l’abaissement de l’âge minimum, cette filière va peut-être disparaître », explique Pierre-Antoine Bonnamour. « Les parents prendront peut-être conscience qu'il est possible d’inscrire leur enfant à la conduite accompagnée dès l’âge de 15 ans. Aujourd'hui, il y a encore beaucoup de personnes qui pensent que la conduite accompagnée ne peut commencer qu’à partir de 16 ans », nuance Grégory Méraud. La conduite accompagnée a-t-elle encore de beaux jours devant elle ? Le temps nous le dira !