Utiliser son téléphone dans une station-service : quels sont les risques ?
En station-service, l'usage du téléphone est strictement interdit mais cette règle, méconnue de nombreux automobilistes, est loin d’être respectée. Et avec l’essor du paiement sans contact, un dilemme se pose : comment concilier sécurité et nouvelles pratiques à la pompe ? Des experts apportent leur éclairage.

Indispensable dans notre quotidien, le smartphone nous accompagne partout, au point que l’on oublie qu’il n’est pas le bienvenu dans certaines situations. Son usage est par exemple interdit au volant, sauf dans de très rares cas. Mais saviez-vous qu’il est également proscrit en station-service ? L’utiliser à la pompe présente un réel danger.
Un risque faible, mais pas inexistant
Les stations-service sont des zones dites ATEX, c'est-à-dire des zones présentant un risque d'explosion en raison de la présence d'air et de vapeurs inflammables. C'est la raison pour laquelle l'usage du téléphone y est interdit.
En effet, lors du ravitaillement, les vapeurs de carburant qui s’échappent de la pompe peuvent s'enflammer au contact d'une étincelle. « Un téléphone contient une batterie et donc de l’électricité, explique Francis Pousse, président national des stations-service et d’énergies nouvelles au sein de Mobilians. Lorsqu'il fonctionne, notamment lors d'un appel téléphonique où une sonnerie se déclenche, de petits arcs électriques [des flux de courant électrique traversant l'air NDLR], peuvent apparaître. Dans un environnement saturé en vapeurs de carburant, notamment d'essence, ces décharges peuvent, sous certaines conditions (température élevée, absence de vent, etc.) provoquer un phénomène d'auto-inflammation. »
On pense souvent aux dangers des mégots de cigarette jetés par les automobilistes, mais ceux liés au téléphone portable sont aussi importants.
Christophe Ramond,
Directeur des études et recherches de l’Association Prévention Routière.
À la pompe, le smartphone doit être éteint !
Face à ce risque, la France applique le principe de précaution en interdisant strictement l'usage du smartphone en station-service. Des pictogrammes apposés sur les poteaux rappellent ces règles de sécurité essentielles. Selon l’arrêté du 15 avril 2010 relatif aux prescriptions générales applicables aux stations-service, les consignes indiquées incluent l’interdiction de fumer, l’obligation d’éteindre son téléphone portable, l’interdiction d’approcher tout appareil susceptible de provoquer un feu nu, ainsi que l’arrêt obligatoire du moteur.
« On pense souvent aux dangers des mégots de cigarette jetés par les automobilistes, mais ceux liés au téléphone portable sont aussi importants, souligne aussi Christophe Ramond, Directeur des études et recherches de l’Association Prévention Routière. Une station-service ne se limite pas aux réservoirs d’essence : elle abrite aussi d’autres substances inflammables. Outre les cigarettes, un arc électrique, qu’il soit généré par la pompe elle-même ou par un appareil électronique comme le téléphone, peut enflammer une fuite de gaz ou un liquide inflammable. »
Bon à savoir
L’arrêté du 15 avril 2010 ne prévoit pas de sanctions pour les contrevenants, mais la prudence est de mise. En cas d’accident, si l’usage du téléphone à la pompe est prouvé, la responsabilité de l’automobiliste pourrait être engagée auprès de son assurance.
Les dangers du paiement sans contact à la pompe : quelles solutions ?
Bien que l'interdiction d’utiliser son téléphone en station-service soit clairement établie, son application devient de plus en plus complexe. D’autant plus qu’aujourd’hui, un nombre croissant d’automobilistes privilégient leur smartphone pour régler leurs achats – ou pour payer aux barrières de péage par exemple ! – grâce à des services comme Apple Pay, Samsung Pay, Google Pay ou d’autres applications de paiement sans contact.
Mais face à la règlementation et aux risques liés à l’usage du téléphone en station-service, la question se pose : quel avenir pour le paiement sans contact à la pompe ? « C’est une question sur laquelle nous réfléchissons avec d’autres organisations, ajoute Francis Pousse. Nous devons faire évoluer la réglementation tout en garantissant la sécurité, afin de permettre, à l’avenir, le paiement sans contact par téléphone en station-service. Une solution existe : la borne déportée. Au lieu de payer directement sur la pompe, l’automobiliste effectue son paiement sur un terminal situé à environ trois mètres, en dehors de la zone à risque. »
En attendant une éventuelle installation de bornes déportées, quelles alternatives s’offrent aux pompistes ? « Si l’on souhaite conserver le système actuel, où le paiement s’effectue directement sur l’écran de la pompe, nous pourrions envisager une meilleure isolation des pompes ou la mise en place d’une norme garantissant que les téléphones soient étanches aux vapeurs inflammables – une protection différente de l’étanchéité à l’eau. Avec la dématérialisation croissante des cartes bancaires, il est essentiel que l’on soit prêt. »
L’évolution des moyens de paiements en station-service pose donc un véritable défi. Reste à savoir si la réglementation parviendra à s’adapter aux nouvelles habitudes des automobilistes, sans compromettre leur sécurité. En attendant, mieux vaut garder son téléphone dans la poche… et privilégier la carte bancaire. « Le téléphone peut aussi nous déconcentrer, ce qui est particulièrement risqué lors d’un plein. Il est essentiel de rester attentif à cette tâche », conclut Christophe Ramond. Le message est passé !
Bon à savoir
Peu de stations-service affichent une interdiction pour la cigarette électronique. Pourtant, cet objet présente un risque équivalent à l’usage d’un téléphone à la pompe.