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Voitures sans permis : les « sans P » prennent leur revanche !

Par Marine Madelmond

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Longtemps jugées vieillottes voire ringardes, les voitures sans permis (VSP), aussi surnommées les « sans P » par les plus jeunes, semblent désormais tendance. Elles occupent une place de plus en plus importante dans le parc automobile et au sein des foyers français, avec des ventes en forte croissance ces deux dernières années. Initialement destinés aux non-détenteurs du permis de conduire, ces quadricycles sont désormais plébiscités par une grande diversité d’usagers. Alors, pourquoi un tel succès ? Éléments de réponse.

Les voitures sans permis : c’est quoi et pour qui ?

Comme son nom l’indique, les voitures sans permis se conduisent… sans permis ! Mais outre cette particularité, les VSP ont des caractéristiques bien précises :

  • Leur vitesse maximale est de 45 km/h ;
  • Leur poids n'excède pas 425 kg ;
  • Elles ne peuvent pas circuler sur les autoroutes, voies rapides et périphériques.

Aussi, rouler au volant d’une voiture sans permis en France n’est possible que sous certaines conditions. Ces petits véhicules, définis comme des « quadricycles légers à moteur » par l'Administration française sont accessibles aux plus de 14 ans, détenteurs - pour les personnes nées après le 1er janvier 1988 - du Brevet de Sécurité Routière (BSR), correspondant à la catégorie AM du permis de conduire, délivré après huit heures de formation en auto-école.

Un automobiliste soumis à l'annulation de son permis avec interdiction de conduire prononcée par un juge n'est pas autorisé à conduire de voiture sans permis.

Bon à savoir

Tout comme un véhicule classique ou un cyclomoteur, une voiture sans permis doit être assurée ! Ne pas respecter cette obligation est sanctionné par une amende pouvant aller jusqu'à 150 €. En revanche, aucun contrôle technique n’est requis pour le moment pour une voiture sans permis.

Deux voitures sans permis de la marque Ligier ©Ligier Group
Deux voitures sans permis de la marque Ligier ©Ligier Group

Les chiffres clés du succès

Commercialisées pour la première fois dans les années 1970, les « sans P » continuent leur ascension. Selon les chiffres d’AAA-Data, de janvier à mars 2022 en France, plus de 6 000 nouvelles immatriculations ont été enregistrées, soit une augmentation de 22 % par rapport au premier trimestre 2021. Une croissance qui s'explique par une offre de plus en plus diversifiée et qui répond aux enjeux environnementaux actuels selon Marie-Laure Nivot, responsable intelligence marchés chez AAA-Data : « L’arrivée de nouveaux acteurs comme Citroën avec le modèle électrique AMI, lancé en 2020, n’est pas étrangère à cette tendance, nous explique-t-elle. On note d’ailleurs la part grandissante de l’électrique, qui représente 39 % des immatriculations depuis le début de l’année. Les marques historiques telles que Aixam, Microcar, Ligier ou Chatenet profitent aussi de cet engouement, notamment auprès des jeunes. »­­­

Mais alors, peut-on dire que ce succès est inattendu ? Peut-être… Philippe Colançon, le PDG d’Aixam, n’imaginait pas une telle évolution, près de 40 ans après la création de l’entreprise : « Quand on a démarré l’activité en 1983, on n’aurait jamais imaginé réaliser 18 500 ventes de voitures sans permis en 2022. L’année prochaine, on devrait même dépasser les 20 000 véhicules. Je n’ai jamais travaillé avec un carnet de commandes aussi conséquent. » Même son de cloche pour François Ligier, PDG de Ligier Group : « C’est un marché en très forte croissance », souligne-t-il.

Les « sans P » ont changé de mains !

Les voitures sans permis ne séduisent plus seulement les séniors isolés non-détenteurs du permis de conduire et les adolescents en quête d’indépendance. Désormais, les VSP attirent bon nombre d’usagers, qui n’avaient alors jamais ressenti le besoin de se déplacer en voiturette : « Jusqu’à la fin des années 1990, les clients d’une voiture sans permis étaient des personnes âgées vivant à la campagne, relate Philippe Colançon (Aixam). Ce véhicule jouait un rôle social, puisque ces individus non-détenteurs du permis de conduire qui vivaient en ville et prenaient leur retraite se rendaient vite compte qu’ils n’avaient qu’un seul choix pour se déplacer : conduire un cyclomoteur ou une voiture sans permis. » Mais au fil des années, ce petit véhicule a fait d’autres adeptes : « Fin 2000, après une étude de marché, on a constaté un rajeunissement de la clientèle ; deux tiers de nos clients étaient des actifs », ajoute le fabricant.

« 42 % des utilisateurs de l'AMI ont moins de 18 ans. »

Sylvie Krigier,
chargée de communication produit Citroën

La tendance se dessine aussi chez les concurrents. Comme nous l’indique Sylvie Krygier, chargée de communication produit Citroën, 77 % des clients de l’AMI sont des familles avec un adolescent, voire deux, pour un usage partagé, et 85 % des commandes sont motivées « par besoin d’un véhicule complémentaire, qui va remplacer un deux roues ». « Si 42 % des utilisateurs de l'AMI ont moins de 18 ans, les parents comptent bien l’utiliser aussi pour leurs déplacements autour de leur domicile », affirme-t-elle. Preuve que la « sans P » a trouvé sa nouvelle clientèle !

Voiture sans permis Aixam stationnée à Strasbourg en janvier 2021 ©iStock
Voiture sans permis Aixam stationnée à Strasbourg en janvier 2021 ©iStock

La pandémie a-t-elle lancé la machine ?

Possible conséquence de la pandémie de Covid-19, les Français ont délaissé un temps les transports en commun pour se tourner vers un autre moyen de locomotion, à l’image de la voiture sans permis : « À partir du mois de juin 2020, les commandes ont augmenté de façon très importante, explique Philippe Colançon. Nous vendions environ 12 000 véhicules avant le Covid. L’an passé, on était à 16 000 ventes. On a vite compris que la pandémie avait changé l’état d’esprit des gens, et plus particulièrement celui des parents. Ils ne veulent plus voir leur(s) enfant(s) dans les transports scolaires ou en commun. Pour plus de sécurité, ils leur achètent une voiture sans permis. »

Selon François Ligier, une autre catégorie d’usagers, âgés entre 20 et 30 ans, a aussi opté pour ce type de véhicule ces deux dernières années : « Bien que ce ne soit pas l’unique facteur, le Covid a sans doute participé à l’accélération du marché en France, ajoute-t-il. Certains individus, souvent les jeunes actifs, ont fui les transports en commun. »

LA voiturette à la mode

Avec des gammes personnalisables, les voitures sans permis ne sont plus considérées comme ringardes. En prenant un virage à 180 degrés dans l’industrie, elles ne sont plus les « pots de yaourt » pointés du doigt sur les routes : « Ces véhicules sont de plus en plus désirables dans leur présentation, affirme François Ligier. Leur style a beaucoup évolué. Il y a dix ans, la clientèle ne souhaitait pas être vue au volant d’une sans permis. Il fallait donc imaginer des véhicules sobres afin de passer inaperçu. Aujourd’hui, c’est tout l’inverse. Le client veut assumer complètement sa voiture sans permis avec un design original et des couleurs pétantes. Pour preuve, le rouge est la couleur la plus vendue chez nous. »

« Ces véhicules sont de plus en plus désirables. Leur style a beaucoup évolué. »

François Ligier,
Président Directeur Général chez Ligier Group

Véritable solution de micromobilité, la voiture sans permis offre bien des avantages pour celles et ceux qui la conduisent. Pratique et très maniable car ultra-compacte, plus sécuritaire qu’un deux-roues grâce à sa carrosserie et moins gourmande en énergie qu'une auto de type citadine, elle se démarque aussi en version électrique : « La voiture sans permis est une réponse concrète aux nouvelles attentes de mobilité pour des trajets de proximité (…) et en phase avec les évolutions de notre société », peut-on lire dans le communiqué de presse dédié à l’AMI Citroën.

Les constructeurs redoublent d’ailleurs d’efforts pour proposer des gammes variées en électrique. Ainsi, les VSP deviennent une option écologique pour conduire sans restriction dans les Zones à Faibles Émissions (ZFE). À noter que le désir de « rouler plus écolo » arrive en troisième position des motivations d’achat pour l’AMI de Citroën. Selon le communiqué de la marque, « les clients apprécient que ce quadricycle électrique contribue à réduire l’empreinte énergétique. » L’heure de la revanche des « sans P » a bel et bien sonné !