Moins de voiture, plus de solutions alternatives : quand Montpellier repense sa mobilité

Gratuité des transports, essor du covoiturage, réduction de la place de la voiture en centre-ville… À Montpellier, la politique de mobilité amorce un virage radical. Lors d’une table ronde organisée par Roole, trois acteurs du secteur ont présenté les ambitions de la Métropole en matière de mobilité. Mais comment ces changements influencent-ils le quotidien des Montpelliérains ? Nous sommes aussi allés sur place pour leur poser la question.

Marine Madelmond
À Montpellier, les transports en commun sont gratuits. ©iStock

Montpellier, en pleine mutation urbaine, multiplie les initiatives pour transformer les habitudes de déplacement de ses habitants. À travers l'amélioration du réseau de transports en commun, l’essor du covoiturage et le développement de l’intermodalité - le fait de combiner plusieurs modes de transport sur un même trajet - la métropole s'engage à devenir un modèle de transition.

À l'occasion d'une table ronde organisée par Roole ce jeudi 19 juin 2025, trois acteurs locaux de la mobilité ont répondu aux questions d'une soixantaine d'administrés. Étaient présents Johan Peignin, chargé de mission au pôle mobilité de la Métropole, François Fantin, directeur régional de Blablacar Daily et Christophe Morgo, vice-président du département de l’Hérault, en charge de l’environnement.

De gauche à droite sur scène : Christophe Morgo, François Fantin et Johan Peignin ©Roole
De gauche à droite sur scène : Christophe Morgo, François Fantin et Johan Peignin ©Roole
De gauche à droite sur scène : Christophe Morgo, François Fantin et Johan Peignin ©Roole

Montpellier : un laboratoire pour les mobilités

Pour accompagner la transition vers une mobilité plus durable, la Métropole déploie de nouveaux aménagements pour les usagers. Parmi les projets phares figurent la future ligne 5 du tramway, l’extension de la ligne 1 vers la gare Montpellier Sud de France, ainsi que la création de cinq lignes de « Bustram », ces bus à haut niveau de service circulant sur des voies réservées. En parallèle, de nouveaux parkings relais vont voir le jour pour favoriser l’intermodalité. Côté mobilités douces, la ville mise sur les « Vélolignes Montpelliéraines », un réseau express vélo destiné à relier les communes du territoire entre elles. Pour encourager l’usage du deux-roues, des aides à l’achat de vélos à assistance électrique, y compris pour les professionnels, ont été mises en place.

Un espace public redistribué au détriment de la voiture

Une dynamique qui, si elle transforme profondément le cœur de la ville, laisse en suspens la question de l’équité territoriale pour les habitants des zones moins bien desservies. Selon Christophe Morgo, vice-président du département de l’Hérault, les effets de cette politique dépassent largement les frontières de la métropole. « Un fossé se creuse entre Montpellier et les communes excentrées. Pour les habitants des zones rurales, il devient de plus en plus difficile de venir en centre-ville, que ce soit pour travailler, étudier ou accéder aux soins. Les lignes de transports en commun ne desservent pas toujours bien le secteur. Et pour ceux qui prennent la voiture, il faut aussi compter le coût du stationnement, désormais payant partout. »

Un sentiment partagé par plusieurs personnes interrogées dans notre micro-trottoir : « Aux alentours de Montpellier, je prends ma voiture, parce que je suis soignant à domicile et il n'y a pas assez de trams malgré la construction qui est en train de se faire », regrette un Montpelliérain. « Quand on a des visites à faire, on met un temps fou dès que l'on doit prendre la voiture. »

La voiture est-elle mise de côté au nom d’un partage plus équilibré de l’espace public ? Sans doute. Mais cette redistribution est nécessaire selon les élus. « L’objectif, c’est de redonner de la place à chaque mode de déplacement, à chaque usager de l’espace public, ajoute Johan Peignin. Un exemple marquant : avant l’arrivée du tramway, la route qui séparait l’université Paul-Valéry de la faculté Polytech était occupée à 98 % par la voiture. Entre deux établissements universitaires, presque tout l’espace était consacré à la circulation automobile. Repenser l’espace public, c’est forcément en rééquilibrer les usages, ce qui implique de retirer de la place à certains pour en donner à d’autres. Aujourd’hui, c’est la voiture qui en fait les frais, après avoir monopolisé l’essentiel de l’espace. »

« On n’aime pas parler de politique anti-voiture. »

Johan Peignin,
chargé de mission au pôle mobilité de la Métropole de Montpellier.

L'autosolisme et la circulation de transit dans le viseur

La Métropole de Montpellier fait de la lutte contre l’autosolisme - ces trajets du quotidien réalisés seul en voiture - une priorité. Cette pratique, encore très répandue, aggrave la congestion routière. Pour y remédier, Montpellier mise sur une stratégie globale : développement du covoiturage courte distance, création de parkings-relais en entrée de ville, amélioration de l’offre de transports en commun et mise en place d’aménagements favorables aux mobilités douces.

Cette volonté de réduire l’autosolisme s’inscrit plus largement dans une politique de régulation de la circulation automobile, notamment en limitant le transit de véhicules dans le centre-ville au profit d’un usage plus raisonné de la voiture. « On n’aime pas parler de politique anti-voiture, souligne Johan Peignin. Ce que nous mettons en place, c’est une politique anti-transit : l’objectif est d’éviter le passage des véhicules en plein cœur de Montpellier en les redirigeant vers les axes périphériques, poursuit le référent mobilité. Il ne s’agit pas de mener une chasse à la voiture, mais de repenser l’offre de mobilité dans son ensemble. »

Bon à savoir

Selon TomTom Traffic Index, Montpellier se classe au 17ᵉ rang des villes les plus embouteillées de France. En 2024, un conducteur montpelliérain a passé en moyenne 62 heures bloqué dans les bouchons en centre-ville.

Le covoiturage, une alternative envisageable 

Dans les territoires ruraux et périurbains, le covoiturage s’impose comme une solution pertinente pour répondre aux enjeux de mobilité du quotidien. Consciente de ce levier, la Métropole a noué un partenariat avec BlaBlaCar Daily - anciennement Klaxit - pour encourager les trajets partagés entre domicile et lieu de travail sur l’ensemble de ses 31 communes. L’offre est incitative : les passagers peuvent effectuer gratuitement des trajets jusqu’à 30 km, tandis que les conducteurs perçoivent entre 1 et 2 euros par trajet et par passager.

En octobre 2024, ce dispositif affichait déjà près de 80 000 inscrits et plus de 21 millions de kilomètres parcourus, évitant ainsi l’émission de 2 350 tonnes de CO2. « On essaie de mailler au maximum le territoire, explique Christophe Morgo, vice-président du département de l’Hérault. En 2025, 22 aires de covoiturage seront disponibles, et 12 autres sont prévues d’ici 2027. » Les résultats sont déjà là : Montpellier est aujourd’hui la deuxième métropole de France en nombre de trajets quotidiens en covoiturage. Une dynamique en pleine expansion qui montre que cette solution fonctionne, en particulier pour desservir les zones rurales peu ou mal couvertes par les transports en commun. « C'est en pleine croissance, souligne François Fantin, directeur régional de Blablacar Daily. Mais il faut maintenant qu'on arrive, tous ensemble je l'espère, à faire évoluer nos habitudes. »

La gratuité des transports en commun oui, mais à quel prix ?

Depuis le 21 décembre 2023, les transports en commun sont devenus gratuits pour tous les habitants de la Métropole de Montpellier. Ce dispositif, déjà amorcé par étapes depuis 2020 (week-ends, puis abonnés de moins de 18 et plus de 65 ans), est désormais généralisé via un pass TaM. Une avancée saluée pour sa dimension sociale et écologique, car elle favorise l’accès à la mobilité pour tous et encourage le report modal vers des solutions moins carbonées. Mais cette politique interroge sur le plan financier. « Je me pose des questions sur l'impact financier, nous confie une jeune femme dans notre micro-trottoir. Je comprends que ce soit gratuit pour les étudiants et minima sociaux, en revanche je suis moins convaincue par l'universalité de la gratuité. » Même son de cloche pour une autre interrogée. « Gratuit, ce n'est pas le bon mot. En réalité, quelqu’un paie forcément. »

Un questionnement des usagers, auquel les responsables de la Métropole apportent des éléments de réponse. Car la gratuité représente bel et bien une dépense publique assumée. « C’est un choix politique très fort qui a été fait à partir du nouveau mandat de Michaël Delafosse (PS). Le coût de la gratuité des transports s’élève à environ 25 millions d’euros par an », précise Johan Peignin, représentant de la Métropole. Alors, comment financer cette mesure ? La réponse tient dans le dynamisme du versement mobilité : « C’est un impôt que paie toute entreprise de 11 salariés et plus, à hauteur de 2 % de sa masse salariale. Entre 2019 et 2024, le versement mobilité est passé d’environ 10 millions d’euros à 120 millions d’euros. Cette augmentation vient financer la gratuité. On parle de 5 % du budget de la Métropole de Montpellier au final. »

Bon à savoir

Depuis la mise en place de la gratuité, la fréquentation des transports en commun a augmenté de 35 %, selon les chiffres communiqués par la Métropole de Montpellier.

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