Le covoiturage, ça ne rapporte (presque) rien : vrai ou faux ?
Le covoiturage permet à tous ceux qui le pratiquent de partager les frais d’usage d’une voiture, qu’ils soient conducteurs ou passagers. Grâce à cette pratique de mobilité partagée, les frais évités peuvent être considérables sur une année. On fait le point avec Thomas Matagne, fondateur de l’opérateur de lignes de covoiturage Ecov.
Covoiturer est un moyen de partager – au-delà de son trajet – les frais d’un déplacement en voiture : essence ou recharge électrique, péages… Dans un schéma de covoiturage classique, plus il y a de passagers dans une voiture et moins la facture individuelle est élevée. Véhiculer des passagers en covoiturage n'est cependant pas le seul moyen de gagner en pouvoir d'achat. Explications.
Jusqu'à 1800 € d'économisés pour un conducteur
On estime que chaque kilomètre parcouru en covoiturage, que ce soit sur une ligne de covoiturage ou avec une plateforme de type Blablacar Daily ou Karos, permet au conducteur de toucher de l'ordre de 10 centimes par occupant. « C’est moins que le coût de l’essence et que le coût de l’amortissement de la voiture au global, mais c’est un partage de frais qui est non négligeable », estime Thomas Matagne. « Les conducteurs très réguliers sur nos lignes de covoiturage ont des partages de frais qui peuvent monter à 100 ou 150 euros par mois. Covoiturer permet donc vraiment d’amortir une partie du coût de l’usage de la voiture ». Sur une année complète, un conducteur qui partage ses trajets du quotidien pourrait ainsi espérer gagner jusqu'à 1 800 euros : de quoi rembourser une bonne partie des frais d’essence et d’entretien du véhicule. Pour rappel, on estime qu’une citadine thermique qui parcourt 12 000 km par an coûte 1 500 euros en carburant et 1 300 euros en entretien. Pour une citadine électrique, à conditions équivalentes, il faut prévoir environ 500 euros de recharge électrique et 1 100 euros d’entretien.
Une prime incitative de 100 euros
Depuis début 2023, l’Etat français propose par ailleurs aux nouveaux conducteurs covoitureurs une prime covoiturage de 100 euros. Une incitation reconduite en 2024 pour les trajets de moins de 80 km. Concrètement, pour l’obtenir, le conducteur doit s'inscrire sur l’une des plateformes de covoiturage agréées par l’Etat et effectuer au moins 10 trajets en covoiturage. 25 euros minimum lui sont versés au premier trajet, les 75 euros restants après le dixième trajet (réalisé dans un délai de 3 mois à partir du premier trajet). C'est peu à l'échelle des gains que l'on peut espérer du covoiturage et c'est une somme que l'on ne peut toucher qu'une seule fois, au moment de sa première inscription sur une plateforme, mais c'est déjà ça !
Les passagers ont tout à gagner
Le conducteur peut donc facilement s’y retrouver, mais qu’en est-il des gains pour les passagers ? Certains services développés par les collectivités territoriales sont rendus gratuits pour les passagers : dans ce cas, le gain est évident, car l’usager ne débourse pas un centime pour réaliser un trajet qui lui aurait coûté le prix d’usage de sa propre voiture ou bien le prix d’un ticket de transport en commun. Et même quand le service de covoiturage est payant, les passagers réalisent des économies : « Le coût d’usage d’une voiture, c’est à peu près 30 centimes par kilomètre. Donc même s’il paye 10 centimes par kilomètre pour partager les frais avec le conducteur, le passager va économiser 20 centimes par kilomètre », relève le fondateur d’Ecov. D’après le baromètre 2023 de l’Ifop pour Alphabet Mobilité, la distance moyenne des trajets domicile-travail des Français est de 18 km. En prenant un covoiturage pour se rendre au travail, un Français peut donc en théorie (et en moyenne) économiser 3,60 euros par trajet, et donc plus de 7 euros par jour. Sur un mois de covoiturage domicile-travail, un passager qui renonce à prendre sa propre voiture peut donc espérer réaliser plus de 140 euros d’économies. Multiplié par les 12 mois de l’année, on arrive à plus de 1 600 euros économisés !
La démotorisation : le bénéfice ultime du covoiturage
« Grâce à nos lignes de covoiturage, on obtient même de la démotorisation », se félicite Thomas Matagne. « C’est-à-dire que le service est de suffisamment bonne qualité pour que, comme s’il y avait un tram ou un métro, les gens se disent qu’ils peuvent revendre l’une des voitures du ménage. Quand on a une démotorisation, les coûts évités sont colossaux, de plusieurs centaines d’euros par mois puisque l’ensemble des coûts liés à l’usage et à l’entretien de la voiture peuvent disparaître », explique-t-il. Sans compter les frais de possession !
En conclusion, le covoiturage, s’il devient un réflexe de mobilité, peut permettre de faire de grosses économies ! En plus d'être une pratique solidaire, qui permet aussi de créer du lien social et d’agir concrètement pour l'environnement. « Dans certaines villes où nous installons des lignes de covoiturage, il n’y a pas de partage de frais. Donc ça ne rapporte rien au sens financier du terme. En revanche, les gens le font activement parce qu’ils y trouvent un intérêt social, un intérêt de participation à la solidarité et à la transition écologique et ça, ce n’est pas rien, c’est important », souligne Thomas Matagne, fondateur de l’opérateur de lignes de covoiturage Ecov.