• Accueil
  • Vidéos

À Grenoble, une solution de covoiturage « spontané » fait ses preuves !

Par Eva Gomez

Partager cet article

Et si covoiturer était aussi simple que prendre un bus ? C’est la promesse des « lignes de covoiturage » déployées dans les collectivités par Ecov. Cette solution de covoiturage sans rendez-vous, avec des arrêts fixes, a pour objectif de faciliter les trajets du quotidien. Nous sommes allés voir comment ce service fonctionne à Grenoble, où il est implanté depuis l’automne 2020.

Organiser un covoiturage demande une anticipation logistique. Point de rendez-vous, horaire, destination… Et parfois, on a besoin de se déplacer à un instant T, sans avoir le temps de prévoir tous ces détails. On peut alors, au mieux, opter pour un transport en commun et au pire, faire le déplacement seul dans sa voiture, si on en a une !

C’est une solution hybride entre le covoiturage organisé et les transports en commun que propose l’entreprise Ecov dans différentes agglomérations françaises : une version « spontanée », qui facilite le covoiturage quotidien sur des trajets domicile-travail essentiellement. La solution consiste à déployer des lignes de covoiturage avec plusieurs arrêts, auxquels les passagers pourront attendre un conducteur, comme sur n'importe quelle ligne de réseau de transport. Grâce à une application, le passager indique sa présence à l’arrêt et sa destination, ce qui déclenche un message visuel et une notification à l’attention des conducteurs qui sont en route sur le trajet demandé. Fluide, efficace et sécuritaire, cette solution est donc complémentaire aux réseaux de transports.

À Grenoble, le Syndicat Mixte des Mobilités de l’Aire Grenobloise (SMMAG) a fait appel à Ecov pour déployer cette solution. « Depuis 2019, nous avons mis en place différents leviers de covoiturage », explique Luc Rémond, 6e Vice-Président du SMMAG. « M’Covoit Pouce est un système d’auto-stop organisé et M’Covoit Rendez-Vous est une solution de covoiturage organisé déployé sur toutes les grosses zones d’activité économique de la métropole, du Voironnais et du Grésivaudan. En 2020, avec Ecov, nous avons lancé M’Covoit Lignes + : des lignes de covoiturage sans rendez-vous et avec des arrêts prédéterminés », détaille-t-il. Des arrêts la plupart du temps positionnés à des endroits stratégiques, à l'entrée des zones d'activité ou encore sur des parkings relais.

Le service est totalement gratuit pour les passagers. Les conducteurs sont indemnisés à hauteur de 2 euros par passager, et 1 euro en cas de voyage à vide.

Un service complémentaire aux transports en commun

Dix lignes de covoiturage ont ainsi été développées avec pas moins de 20 arrêts, qui couvrent les territoires du Voironnais et du Grésivaudan, au nord-ouest et au nord-est de Grenoble. L’objectif : permettre aux personnes qui vivent à l’extérieur de l’agglomération de s’y rendre le plus facilement possible. Un service public totalement gratuit pour les passagers. Les conducteurs sont quant à eux indemnisés à hauteur de 2 euros par passager, et 1 euro en cas de voyage à vide. « L’idée est de venir en complémentarité des offres de transports en commun. C’est très différent d’une ligne de covoiturage à l’autre : sur certaines, il n’y a aucune offre de transport en commun et on vient apporter un service là où il n’y en a pas. Sur les lignes où il y a déjà des offres de transports, notre service permet un usage mixte : les usagers attendent leur bus, en attendant ils font une demande de covoiturage. S'ils partent plus rapidement avec un conducteur, tant mieux. Et s'il n'y a pas de conducteur, ils annulent leur demande et partent avec le bus. Le but, c'est qu’à la fin, ils partent le plus rapidement possible », explique Benjamin Arnaud, développeur de communauté chez Ecov. « L'intérêt, c'est d'aller jouer la complémentarité sur des bus qui vont passer toutes les 15 à 30 minutes, en amenant une fréquence d’une voiture toutes les cinq minutes », ajoute-t-il.

Et pour convaincre ceux qui hésitent à se lancer ou doutent de l’efficacité du service, Ecov propose une « garantie départ ». « Le service est ouvert de 6 heures à 21 heures, mais il y a un système d’heures de pointe, le matin et le soir. A ces heures de pointe, si au bout de 15 minutes le passager n’a pas eu de conducteur, l’assistance l’appelle et lui envoie un taxi pour l’emmener à destination », détaille Benjamin Arnaud. Une garantie destinée à rassurer l’usager, mais qui est en réalité très peu déclenchée. « Entre avril et juin 2023, on est sur moins de 1 % de déclenchement de garantie départ », précise-t-il.

Depuis que je fais ça, je connais des gens qui travaillent tout autour. Et quand je dois descendre à Grenoble tout seul, ça fait bizarre !

Jan,
usager de M’Covoit Lignes +

Un moyen de transport créateur de liens sociaux

Car le service fonctionne ! Entre janvier et septembre 2023, 15 000 trajets ont été effectués sur l’ensemble du réseau, et sur le seul mois de septembre, 1 000 usagers uniques ont utilisé le service. À l’image d’Anne, qui utilise l’application quasi quotidiennement, aussi bien en tant que conductrice que passagère. Elle était déjà une habituée du covoiturage avant l’existence de M’Covoit Lignes + « mais seulement avec des proches ou des collègues. Au début, j’avais peur d’en faire avec des gens que je ne connaissais pas, surtout en tant que passagère. Mais aujourd’hui, je ne me pose plus du tout de questions ! », confie-t-elle. « On est bien accompagnés : la première fois que j’ai utilisé le service, on m’a appelée ensuite pour me demander si tout s’était bien passé, si j’avais tout bien compris… Il existe aussi un groupe Whatsapp avec plusieurs usagers fréquents », explique Anne. Sur ce groupe de conversation, les habitués peuvent formuler des demandes de trajets sur des horaires spécifiques, afin de faciliter les échanges et les départs. « Ça développe une communauté et on sait qu’on ne va pas rester coincés ! » conclut Anne.

Un aspect social sur lequel se rejoignent d’autres usagers réguliers du service, tels qu’Amparo et Jan. « Ça m’est déjà arrivé de tomber sur le même conducteur, mais la plupart du temps c’est différent. Et chaque jour, c’est une nouvelle rencontre. On ne sait jamais le matin avec qui on va voyager, et le soir c’est pareil. C’est sympa parce que ça nous ouvre des portes de sociabilité », partage Amparo, qui utilise M’Covoit Lignes + depuis janvier 2023. « Ma motivation principale, c’était vraiment de réduire mes émissions de CO2, le covoiturage résout pas mal de problèmes, c’est beaucoup moins cher. (…) Et depuis que je fais ça, je connais des gens qui travaillent tout autour et quand je dois descendre à Grenoble tout seul, ça fait bizarre ! », abonde Jan.

A l’échelle européenne, passer à un taux d’occupation de 1,5 (contre 1,3 actuellement), cela reviendrait, en termes d’impact carbone, à remplacer 30 millions de véhicules thermiques par des véhicules électriques.

Benjamin Arnaud,
développeur de communauté chez Ecov

Un levier pour atteindre la neutralité carbone

Du lien social, un gain de temps, de la simplicité… Mais aussi un impact positif pour l’environnement en combattant l’autosolisme. « La vision d’Ecov est de voir les voitures comme des ressources, des sièges vides (…) qui ont de la valeur et ne sont pas utilisés. Aujourd’hui, on sait que sur les trajets du quotidien, le taux d’occupation des véhicules est de 1,3*. A l’échelle européenne, passer à un taux d’occupation de 1,5 (contre 1,3 actuellement), cela reviendrait, en termes d’impact carbone, à remplacer 30 millions de véhicules thermiques par des véhicules électriques. Il y a donc un enjeu énorme de changement de comportement et de sobriété », souligne Benjamin Arnaud. Même sans aller jusqu’à cette échelle, le covoiturage se présente comme une solution simple et économique pour les collectivités qui souhaitent désengorger le trafic et réduire l’autosolisme. « Le covoiturage est le système de transport en commun le moins cher pour tout le monde : on utilise des infrastructures et des voitures qui existent déjà ! », appuie Luc Rémond du SMMAG.

Dans les mois à venir, Ecov va continuer à analyser le service pour chercher à l'améliorer, car certaines lignes de covoiturage fonctionnent mieux que les autres. « On a trois ans d’expérience sur les lignes existantes. On commence à voir ce qui marche et ce qui marche un peu moins. Il faut donc réajuster le réseau : comme avec les transports en commun ! » souligne Benjamin Arnaud. De nouvelles lignes sont à l’étude pour couvrir la partie sud de l’aire Grenobloise et dès janvier 2024, une nouvelle ligne sera inaugurée pour desservir le Vercors. « Il y a une vraie demande car il n’y a presque pas de transports en commun en ligne régulière sur cette zone », remarque Luc Rémond. Cette ligne devrait donc permettre aux habitants du Vercors se rendant quotidiennement à Grenoble, de se rencontrer pour faire la route ensemble !

*Taux d’occupation de 1,3 : sur dix voitures, on trouve 10 conducteurs et seulement 3 passagers.