Déploiement des bornes de recharge publiques : on en est où ?

Le manque de bornes de recharge publiques est l'un des principaux freins à l’adoption du véhicule électrique. Si la France n’est pas le pire élève en Europe, elle doit encore étoffer et fiabiliser son réseau pour permettre à tous d’adopter ce moyen de transport décarboné. Point à date sur le déploiement de ces bornes.

Victor Lantignane

Selon une étude réalisée en 2020 par l’opérateur et fabricant de bornes EVBox, 52 % des européens ne souhaitant pas passer à l’électrique motivent leur choix par la crainte de ne pas trouver de solution de recharge. Une inquiétude légitime : le déploiement du réseau de bornes publiques est très inégal d’un pays à l’autre. S’il est embryonnaire en Espagne, Grèce et Pologne, le réseau est nettement plus développé en Allemagne, aux Pays-Bas et au Portugal. La France se trouve à mi-chemin, avec des bornes encore inégalement réparties et dont la fiabilité n’est pas constante.

Objectif : 1 borne pour 10 véhicules électriques

L’expansion du réseau s’est toutefois nettement accélérée dans l’hexagone en 2021, après un fort ralentissement dû à la pandémie de Covid-19. Malgré cela, elle peine toujours à suivre l’explosion des ventes de voitures électriques. Moins de 21 000 nouvelles bornes étaient installées l’année dernière, alors que 162 000 véhicules électriques ont été mis en circulation.

Au 30 juin 2022, la France comptait 64 546 points de charge, soit environ 1 borne pour 9 voitures électriques.

Au 30 juin 2022, notre pays comptait un total de 64 546 points de charge, soit environ 1 borne pour 9 voitures électriques. « La France est en-dessous du ratio initialement recommandé par la Commission européenne d’1 point de recharge pour 10 véhicules » nous explique l’AVERE, l’Association nationale pour le développement de la mobilité électrique.

201920202021
Ventes de voitures électriques neuves42 763110 916162 106
Installations de nouvelles bornes publiques3 7294 19920 931

Source : AVERE France, CCFA

« Le nombre de points de recharge doit suivre l’évolution du marché des véhicules électriques » prévoit l’organisation, qui estime « entre 330 et 480 000 points de recharge ouverts au public à horizon 2030 ». L’objectif de 500 000 bornes d’ici 2027 annoncé par Emmanuel Macron lors de sa campagne présidentielle devrait donc être atteint. « Au niveau européen, les objectifs discutés dans le cadre de l’AFIR (Alternative Fuel Infrastructures Regulation) sont d’une station de recharge tous les 60 kilomètres, de 3,5 millions de bornes en 2030 et de 16,3 millions d’ici à 2050 » précise l’AVERE.

Le saviez-vous ?

Un « point de charge » désigne une prise sur laquelle une seule voiture électrique peut se recharger. Une borne peut proposer une ou plusieurs prises. Le terme « point de charge » ne doit pas être confondu avec celui de « station », qui désigne un regroupement de plusieurs bornes et donc de plusieurs points de charges.

Toutes les bornes de recharge publiques ne se valent pas

Si le nombre de points de charge donne une idée du développement du réseau, il ne témoigne ni de sa qualité ni de sa pertinence en termes de répartition géographique. « Le nombre de points de recharge est un indicateur important, mais il n’est clairement pas le seul. L’emplacement des points de recharge, leur puissance, leur entretien et leur accessibilité sont également importants » confirme l’AVERE.

En effet, tous les points de charge ne se valent pas. Les prises et bornes peuvent délivrer différentes puissances (et donc vitesses de recharge), différents tarifs, moyens de paiement et conditions d’accès. Elles peuvent être situées à des endroits plus ou moins pratiques, être plus ou moins nombreuses selon les régions, villes, quartiers. Elles sont aussi plus ou moins bien entretenues, donc plus ou moins régulièrement hors-service. Une borne de recharge ultra-rapide parfaitement entretenue et située le long d’un axe très fréquenté servira un nombre de voitures électriques bien supérieur à une borne lente, peu entretenue et placée dans une zone difficile d’accès.

Selon l’AVERE, « il est nécessaire de trouver la "bonne borne’" au bon endroit et de garantir une maintenance et une expérience utilisateur efficaces. […] Au-delà du nombre de points de recharge, il convient surtout de veiller à ce que ces infrastructures soient placées au bon endroit et à la bonne puissance, d’autant plus lorsque l’on sait que 90 % des utilisateurs de véhicules électriques se rechargent à domicile ».

Recharger hors de chez soi n’est pas toujours indispensable

Contrairement aux véhicules thermiques, qui ne peuvent fonctionner sans station-service, une voiture électrique peut tout à fait être utilisée sans être rechargée sur des bornes publiques. La plupart des utilisateurs de véhicules électriques ne se servent jamais du réseau public au quotidien. Ils se contentent du point de charge présent à leur domicile ou sur leur lieu de travail.

Réseau public et réseau privé doivent s’étendre simultanément pour permettre à tous de rouler en véhicule électrique en toute polyvalence.

Les bornes publiques ne sont finalement utiles qu’aux personnes voyageant ou ne disposant pas de solution de recharge privative. Le déploiement du réseau de recharge « privé » (en parking de résidences, entreprises, box individuels…) est donc autant - si ce n’est davantage - pertinent que le développement du réseau public. A ce sujet, l’AVERE rappelle d’ailleurs qu’« il est indispensable de faciliter la recharge en copropriété ». Ces deux réseaux doivent s’étendre simultanément pour permettre à tous de rouler en véhicule électrique en toute polyvalence.