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Consommer du CBD ou conduire : faut-il choisir ?

Par Etienne Lejeune

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Les boutiques de CBD fleurissent un peu partout en France. Mais s’il suffit de pousser la porte de l’une de ces boutiques spécialisées pour s’en procurer, conduire après en avoir consommé peut coûter cher ! Décryptage.

La légalité du CBD en question

Le CBD est l'abréviation de cannabidiol, une substance issue du chanvre et présente dans le cannabis. Mais il est différent du THC (tétrahydrocannabinol), qui lui est reconnu comme un psychotrope et totalement interdit à la consommation en France. A ce jour, il est particulièrement compliqué de s’y retrouver sur le statut exact du CBD. De multiples décisions contradictoires ont été rendues en la matière au point que cela tourne au feuilleton :

  • Le 19 novembre 2020, la Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE) juge dans l’arrêt "Kanavape" qu'en l’état des connaissances scientifiques et sur la base des conventions internationales en vigueur, l’huile de CBD ne constitue pas un produit stupéfiant.
  • Le 23 juin 2021, la Cour de cassation rend une décision qui fait du bruit puisqu’elle confirme la possibilité de vendre en France du CBD produit dans un autre Etat européen (Crim. 23 juin 2021, n°20-84212), confortant ainsi la légalité de la vente, de l'acquisition et de la consommation du CBD en France.

  • Le 31 décembre 2021, un arrêté ministériel est publié au Journal Officiel, qui autorise la culture, l’importation, l’exportation et l’utilisation industrielle et commerciale des seules variétés de Cannabis stiva L. dont le teneur en delta-9-tétrahydrocannabiol n’est pas supérieure à 0,3 %. Dans le même temps, l’arrêté interdit finalement la vente de la fleur et de la feuille de chanvre à l’état brut de ces mêmes variétés.

  • Le 24 janvier suivant, l’interdiction de commercialisation des fleurs et feuilles de chanvre est suspendue par le Conseil d’Etat.

  • Dans une décision du 7 janvier 2022, le Conseil constitutionnel précise les critères de définition d’un stupéfiant. Le Conseil retient deux critères cumulatifs pour définir un produit stupéfiant : « l’accoutumance » et les « effets nocifs pour la santé », renvoyant à l’autorité administrative le soin de classer certaines substances dans la catégorie des stupéfiants « en fonction de l’évolution de l’état des connaissances scientifiques et médicales ». Et les professionnels du CBD considèrent que le CBD ne rentre pas dans cette catégorie.

Au final, la légalité du CBD semble acquise pour le consommateur et on ne peut considérer le CBD comme un stupéfiant dès lors que sa teneur en THC est inférieure à 0,30 %, sous réserve de nouvelles évolutions... Mais si le consommateur de CBD piéton est dans les clous, il en va différemment pour le consommateur de CBD conducteur.

Le CBD, un produit légal pour le consommateur, pas pour le conducteur !

La loi n’interdit pas expressément de conduire après avoir fait usage de CBD. Globalement, l’article L.235-1 du code de la route réprime le fait de conduire après avoir « fait usage de substances ou plantes classées comme stupéfiants ».

Et les dernières décisions, même si elles sont évolutives et parfois contradictoires, admettent quand même la légalité du CBD, avec un taux de THC inférieur à 0,30 %, empêchant normalement le conducteur ayant consommé du CBD d’être en infraction !

En théorie, il ne devrait pas y avoir de difficulté particulière, le gouvernement lui-même ayant autorisé la vente du CBD en France, bien que le périmètre des produits autorisés soit sujet à rebondissements. Et les effets sur la conduite, même s’ils font débat, semblent limités.

Les dépistages ne distinguent pas le CBD du cannabis !

Les dépistages de produits stupéfiants sont fréquents sur le bord des routes. Et attention : s’il est possible d’acheter légalement du CBD, les tests salivaires à disposition des forces de l’ordre ne font pas la différence entre le CBD et le cannabis !

Ainsi, un conducteur qui n’a consommé que du CBD pourra être testé positif, ce qui est absurde et contradictoire avec l’admission de la consommation de CBD avec une teneur en THC inférieure à 0,30 %. Toute la difficulté réside aujourd’hui dans la défaillance des tests mais aussi dans l’absence de taux limite constituant l’infraction de conduite après usage de stupéfiant. Tout simplement car en fixant un taux limite cela reviendrait ipso facto à légaliser la consommation de cannabis en France.

Les sanctions sont très lourdes !

Un conducteur testé positif, quand bien même il n’aurait pris que du CBD, risque gros !

Déjà, les forces de l’ordre vont immédiatement procéder à la rétention de son permis de conduire pour une durée de 120 h, voire à l’immobilisation du véhicule. Puis le préfet va presque automatiquement prendre un arrêté de suspension administrative, d’une durée généralement de 6 mois. Et le conducteur sera ensuite convoqué en justice. Dans ce cadre, le code de la route prévoit plusieurs sanctions possibles :

Les peines principales

  • 2 ans d’emprisonnement
  • 4 500 € d’amende

Les peines complémentaires

  • Suspension du permis pour 3 ans maximum
  • Annulation du permis de conduire (automatique en cas de récidive !) avec interdiction de repasser le permis pendant 3 ans au plus
  • Stage de sensibilisation à la sécurité routière
  • Confiscation du véhicule
  • etc.

En outre, en cas de condamnation pour conduite après usage de stupéfiants, le conducteur perdra 6 points sur son permis de conduire.