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Et si le marché de l'occasion démocratisait la voiture électrique ?

Par Eva Gomez

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Sur sept véhicules achetés par des particuliers, six sont des occasions. Cette donnée, ainsi que le prix élevé des voitures électriques, suffit à comprendre à quel point le développement d’un marché de l’occasion des véhicules électriques est clé pour l'adoption massive de cette technologie. Aujourd'hui ce marché de l'occasion est naissant, mais bonne nouvelle : vu la dynamique du marché électrique neuf, il devrait prendre de l'ampleur.

Une main tient un cable de recharge électrique vers la prise d'une voiture pour la recharger
Le marché électrique d'occasion est encore quasi anecdotique mais devrait se développer dans les mois et années à venir. ©iStock

Sur les trois premiers mois de 2024, les voitures particulières électriques représentent moins de 2 % du marché de l’occasion, avec 28 682 transactions sur un total de 1,3 million. C’est beaucoup moins que sur le marché du neuf, en proportion comme en volume ! En effet, sur la période, il s’est vendu 3 fois moins de véhicules électriques d’occasion que de véhicules électriques neufs, alors que le marché de l’occasion au global est trois fois plus gros que le marché du neuf. Néanmoins la croissance est bien là : sur un marché de l’occasion toutes motorisations confondues en hausse de 2 %, les ventes de voitures électriques enregistrent une hausse de 70 %. C’est ce que nous apprend le premier baromètre marché des voitures électriques d’occasion de l’Avere France et Mobilians, publié le vendredi 7 juin 2024. « On a voulu faire le point après le boom des ventes de voitures électriques neuves en 2019-2020, car c’est un effet mécanique : les voitures d’occasion d’aujourd’hui sont les voitures neuves d’il y a 4 ans », explique à Roole Clément Molizon, délégué général de l’Avere-France. Les espoirs de voir la voiture électrique se démocratiser grâce à l’essor du marché de l’occasion sont-ils permis ? Décryptage.

Les véhicules immatriculés par des entreprises représentent plus de la moitié des immatriculations de voitures neuves.

Un marché encore trop peu alimenté

Si l’intérêt des Français pour les voitures électriques se confirme, le faible nombre de véhicules disponibles sur le marché de l’occasion fait qu'il est encore balbutiant. « Les particuliers sont les principaux acteurs de la dynamique de l’électrique sur le marché du neuf. Il y a encore des marges de progrès, notamment dans l’apport que peuvent faire les entreprises à ce marché de l’occasion », souligne Clément Molizon. En effet, les véhicules immatriculés par des entreprises représentent plus de la moitié des immatriculations de voitures neuves (53,5 % en 2022) ! Les flottes d'entreprises représentent donc un levier essentiel pour alimenter le marché de l'occasion électrique. Or au premier semestre 2024, les entreprises n'ont pas confirmé leur dynamique d'achat de véhicules électriques sur le marché du neuf. « Si on regarde les transactions faites en voitures neuves, au premier trimestre 2024, les entreprises représentaient 33 % des transactions, contre 52 % en 2019. Leur contribution sur le marché de l’occasion va ralentir », regrette Clément Molizon. Le délégué général de l'Avere-France estime que pour relancer et faire perdurer la dynamique, « il faut des objectifs clairs, bien dimensionnés, mais aussi la possibilité d'avoir un vrai reporting, voire des sanctions, et de valoriser les entreprises qui jouent le jeu ».

En attendant, et sans surprise compte tenu l’historique récent du marché de l'électrique, 87 % des voitures électriques d’occasion ont moins de 5 ans, contre seulement 32 % des voitures thermiques. Au premier semestre 2024, les trois modèles de voitures électriques les plus vendus sur le marché de l’occasion sont la Renault Zoé, la Peugeot e-208 et la Tesla Model 3. « La Renault Zoé et la Tesla Model 3 ont dominé le marché du neuf sur la période 2019-2021, il est donc logique de les retrouver aujourd’hui sur le marché de l’occasion », relève le baromètre.

Succès du leasing pour les électriques d’occasion

Et parmi les Français qui se tournent vers l’électrique d’occasion, ceux qui optent pour le leasing sont de plus en plus nombreux : au premier semestre 2024, ils étaient 32 %, contre 24 % en 2023 et 17 % en 2017. Ainsi, seulement 68 % des voitures électriques particulières d’occasion ont été acquises par achat classique ou crédit, contre 97 % pour les voitures thermiques d’occasion. Mais comment expliquer que le leasing soit particulièrement plébiscité pour les motorisations électriques sur le marché de seconde main ? « C’est lié à la typologie des personnes qui acquièrent des voitures électriques, qui sont beaucoup plus dans une logique de coût total, et aussi dans une logique de facilité de renouvellement du véhicule dans un contexte où la mobilité électrique connaît d’importantes évolutions année après année », estime Clément Molizon, délégué général de l’Avere-France. « Le leasing permet d’être moins captif d’un achat de véhicule. C’est une tendance qu’on a déjà pu constater sur le marché du neuf », souligne-t-il. Cela fait du leasing « un mode de financement adapté à l’acquisition d’une voiture électrique », qu'il faut absolument préserver, estiment les auteurs du baromètre.

25 % des particuliers ayant acheté une voiture particulière d'occasion électrique étaient déjà propriétaires d'une voiture particulière électrique avant revente.

Premier baromètre marché des voitures électriques d’occasion de l’Avere France et Mobilians.

Portrait-robot de l'acheteur de voiture d'occasion électrique

A quoi ressemble l'acheteur de voiture d'occasion électrique ? Il n'est pas très jeune, d'après le baromètre. Les moins de 30 ans continuent d’opter pour des voitures d'occasion thermiques, « vraisemblablement en raison de la différence de prix », est-il souligné. « Les jeunes de 18 à 30 ans représentent 26 % de transactions d’occasion de voitures thermiques, contre 8 % des transactions de voitures d’occasion électriques ». Ce sont plutôt les plus de 50 ans qui sont attirés par la voiture électrique d’occasion. Il en va de même pour les véhicules hybrides et hybrides rechargeables. Contrairement aux idées reçues, cet acheteur n’est pas forcément citadin : 29 % des transactions d’occasion pour les voitures d'occasion électrique s’opèrent en zone rurale, contre 27 % pour les voitures d’occasion thermiques.

L'acheteur de voiture d'occasion électrique est aussi fidèle à la technologie. En effet, il semblerait qu'une fois que les automobilistes ont fait le choix de l'électrique, ils ne reviennent plus au thermique : « 25 % des particuliers ayant acheté une voiture particulière d'occasion électrique étaient déjà propriétaires d'une voiture particulière électrique avant revente », souligne le baromètre.

L'Avere-France et Mobilians mettent par ailleurs en évidence que les acheteurs de voitures électriques d'occasion se tournent en majorité vers les professionnels de l'automobile, gages de sécurité, pour leur acquisition. Les transactions entre concessionnaires et particuliers représentent en effet 61,2 % des transactions de voitures électriques d'occasion. Seules 16,4 % des ventes se font de particulier à particulier, contre 47,8 % si l'on regarde le marché total.

Vers un marché plus attractif ?

« Dans les prochains mois et prochaines années, il y aura de forts enjeux sur ce marché », commente Clément Molizon. « Il faudra faire en sorte d’accompagner le marché de l’occasion électrique pour qu’il puisse se rapprocher de celui du thermique », poursuit-il. « Il y a une équation entre d’un côté, les acheteurs de véhicules neufs qui doivent être rassurés sur la valeur de revente de leur voiture électrique, et de l’autre, des acheteurs de seconde main qui ont l’habitude d’avoir des gammes de prix beaucoup plus bas : il faut que la filière et les pouvoirs publics puissent discuter des bonnes options pour faire en sorte que ce marché de l’occasion soit dynamique et attractif », conclut Clément Molizon.

Dans les prochains mois, l’Avere-France et Mobilians vont justement se pencher sur les façons d’accompagner ce marché de l’occasion, afin de formuler des recommandations à l’attention des pouvoirs publics et de la filière.