Voitures électriques : une route de recharge par induction est testée à Paris
À Paris et Versailles, une technologie de recharge par induction dynamique est testée dans le cadre d’un projet européen. En roulant sur 30 mètres de piste équipée, il est possible de récupérer 2 km d’autonomie !
Recharger sa voiture électrique tout en roulant : c’est possible ! Fin juin 2024, deux sites pilotes de routes électriques ont été présentés à Versailles et à Paris, dans le cadre du projet européen INCIT-EV. Le but : tester une technologie de recharge dynamique sans fil, en milieu urbain. À Paris, le site de test se situe dans la rue Floréal (17e arrondissement), sur une portion de route de 30 mètres. En roulant à 5 km/h sur cette piste, il est possible de récupérer jusqu'à 2 km d’autonomie, avec une recharge à 30 kW… Cela a l'air très peu, mais si on imagine un passage à l'échelle, cette technologie pourrait devenir une vraie solution de recharge !
Bon à savoir
Le projet européen INCIT-EV, lancé en 2020 et doté d’un budget de 18 millions d’euros, a duré plus de 4 ans. Il avait pour ambition d’accélérer l’adoption de la mobilité électrique en Europe, notamment en testant des solutions de recharge innovantes en Espagne, en Italie, en Estonie, en France et aux Pays-Bas. Les partenaires français de ce projet sont l'Avere-France, Enedis, Védécom, Stellantis, Renault, l'Université Eiffel, Colas et la Ville de Paris.
Vers une réduction de la taille des batteries ?
Mais comment un tel système de recharge est-il possible ? « On intègre des bobines dans la voirie, et une bobine sous une voiture électrique. Les bobines dans la voirie sont alimentées en courant alternatif et produisent un champ magnétique. La bobine située sous la voiture récupère l’énergie de ce champ magnétique, comme un transformateur », détaille Joseph Beretta, responsable de la diffusion du projet INCIT-EV à l’international et président d’honneur de l’Avere-France. Dans le véhicule électrique, des éléments permettent ensuite de convertir l’énergie captée pour l’envoyer vers la batterie.
« L’idée, c’est de pouvoir recharger les véhicules électriques pendant qu’ils roulent. À terme, cela permettrait de réduire les besoins en recharge et la taille des batteries des véhicules », explique Éric Lebeau, directeur général de l’institut Vedecom, qui a développé la solution de recharge par induction dynamique déployée pour ces sites pilotes. À Versailles, la technologie est la même qu’à Paris, mais les bobines intégrées dans la voirie sont plus grosses, avec une capacité de charge de 90 kW. « Le démonstrateur est installé dans le centre d’essai de Vedecom, sur un prototype de voie rapide. À Paris, c’est un démonstrateur de recharge dynamique au cœur des villes ; à Versailles, c’est plutôt un démonstrateur pour les trajets de longue distance », précise Joseph Beretta. Pour les voies rapides, compte tenu de la puissance nécessaire, l’idée n’est plus forcément de recharger la batterie de la voiture mais de la maintenir à un niveau stable pendant le trajet. Cette solution viendrait donc en complément du réseau de bornes de recharge français, qui comportait au 30 juin 2024, 133 887 points de recharge publics.
Pas de modifications significatives sur les voitures
Pour la route électrique de Paris, 30 bobines ont été intégrées dans la voirie, soit une par mètre de piste. Du côté des voitures, différents véhicules ont été équipés – un utilitaire et deux voitures particulières – pour tester la solution. À part la hauteur des suspensions qui doit être relevée pour installer la bobine sous le véhicule, une telle technologie n’engendrerait pas de modifications significatives à terme : l’intégration de la bobine et des éléments nécessaires à la conversion de l’énergie peut facilement être compensée par la réduction de la taille de la batterie. L’impact sur le coût d’achat du véhicule serait également compensé par la réduction de la taille de la batterie.
Bon à savoir
Les champs électromagnétiques émis par les bobines sur une solution de recharge par induction dynamique ne sont pas dangereux pour la santé humaine. Sur le site d'essai parisien, ils sont même inférieurs à ceux émis par des plaques à induction !
Lever les écueils économiques et trouver le bon usage
« Sur le papier, ça fait rêver ! Mais pour passer du rêve à la réalité, il faut lever les écueils économiques », souligne néanmoins le président d’honneur de l’Avere-France. Il faut compter environ 2 millions d’euros pour un kilomètre de route équipée de cette technologie, contre 1 million pour un kilomètre de route normale et 1,5 million pour un kilomètre d’autoroute. « Si on projette cette solution sur les autoroutes, il faudrait équiper tout le trajet car l’énergie nécessaire est élevée à grande vitesse », précise Xavier Serrier, responsable des partenariats chez Vedecom. L’ampleur des travaux nécessaires et le coût de la technologie pourraient donc très vite faire monter la facture… « Mais pour un usage urbain, on peut imaginer équiper seulement 10 % des routes, pour recharger des taxis, des VTC, des minibus… Si on passe 1 minute sur une route équipée, on gagne 5 minutes de trajet ! », ajoute-t-il.
Bon à savoir
Fin 2023, un consortium piloté par Vinci Autoroutes a lancé une expérimentation de recharge à induction dynamique sur 2 km sur l’A10, près du péage de Saint-Arnoult dans les Yvelines.
En attendant que cette solution trouve une place dans le paysage de la mobilité électrique, le site parisien va être testé en conditions réelles de circulation, avec notamment le passage de poids lourds. Dans les mois et années à venir, le comportement de l’installation sera étudié, afin d’observer la tenue de la route dans le temps.