Don de voiture : et si votre voiture inutilisée aidait quelqu'un à garder son emploi ?

D’après le dernier baromètre Wimoov, 15 millions de Français sont en situation de précarité mobilité. En France, 40 % des répondants à l'enquête déclarent avoir renoncé à un ou plusieurs déplacements du quotidien au cours des 5 dernières années, et 9 % confient avoir renoncé à accepter un emploi ou à y postuler. La mobilité est en effet un levier déterminant d’accès à l’emploi et Valence Services, association d’insertion professionnelle qui possède notamment deux garages solidaires, situés à Valence à Romans-sur-Isère (Drôme), en a bien conscience. Depuis l’automne 2023, l’association est labellisée par donnezvotrevoiture.org, une plateforme créée en 2022 par Roole et le réseau de garages solidaires Solidarauto, qui facilite la mise en relation entre des particuliers ou professionnels souhaitant faire don d’un véhicule et des garages solidaires. Grâce à cette plateforme de don, des voitures qui ne sont plus utilisées par leur propriétaire peuvent avoir une seconde vie et aider des publics en difficulté ou en situation de précarité mobilité.

Lors de notre reportage à découvrir en vidéo, nous avons rencontré Nadine, qui a donné sa Seat Ibiza de l’année 2000 via la plateforme. Après 24 ans et 220 000 km parcourus, la voiture de Nadine était chère à son cœur, mais elle n'en avait plus l'utilité. « J’ai eu du mal à la quitter, j’ai mis du temps à prendre la décision. Mais il y avait une voiture dans le garage de mon père qui ne servait pas, car il ne pouvait plus conduire depuis quelque temps. Une voiture plus récente que la mienne… Donc c’était plus raisonnable de garder cette voiture-là et de me débarrasser de ma Seat », raconte cette enseignante à la retraite, domiciliée près de Gap. « Vu son âge, on se disait qu’on n’arriverait pas à la vendre, qu’elle n’avait aucune valeur. Je voulais la donner mais j’avais peur de tomber sur des gens qui la prennent pour la revendre ensuite », partage Nadine.

Elle a donc cherché en ligne, une solution pour donner sa voiture. « J’ai trouvé deux sites. Sur le premier, on demandait à ce que la voiture ait moins de 200 000 km ou moins de 20 ans, ce qui n’était pas le cas. Puis j’ai trouvé donnezvotrevoiture.org, j’ai rempli le formulaire et j’ai été recontactée », raconte la donatrice.

C’est Hocine Reguida, responsable du pôle mobilité de Valence Services, qui a recontacté Nadine. « Une fois que les donateurs ont rempli leur formulaire de don sur la plateforme, on reçoit directement la proposition avec les informations sur le véhicule : la marque, le modèle, des photos, ainsi que les coordonnées de la personne. On contacte le donateur et on convient des conditions pour la récupération du véhicule, après s’être assurés de la conformité de l’état du véhicule, qui doit être roulant ». C’est ainsi qu’en juin 2024, à la gare de Gap, Nadine a dit au revoir à sa Seat Ibiza, qui a pris la route pour Valence.

Une fois la voiture récupérée, les mécaniciens du garage lui font passer un pré-contrôle technique pour identifier les éventuelles réparations nécessaires avant le contrôle technique. « On réalise toutes les interventions nécessaires au garage, sachant que les réparations les plus courantes sont le changement de filtres et des plaquettes et disques de frein. En parallèle, on fait toutes les démarches administratives, notamment pour le changement de carte grise. Dès que le véhicule peut rouler en toute sécurité, on bascule l’assurance pour qu’il devienne un véhicule de location et on le propose à des bénéficiaires qui en ont besoin pour aller travailler », détaille Hocine Reguida.

Valence Services réserve son service de location à tarif solidaire à des personnes qui ont besoin d’une solution de mobilité pour un retour à l’emploi, une formation, un stage, une alternance, ou un contrat intérimaire. « On a des contrats de location d’un mois maximum, renouvelables 3 fois. L’idée est d’encourager les bénéficiaires à épargner grâce à nos tarifs sociaux, pour leur permettre de se remettre en selle financièrement et à terme, de s’acheter leur propre véhicule », explique Didier Branson, conseiller mobilité chez Valence Services. Son rôle est également de comprendre les besoins et les enjeux de chaque bénéficiaire, pour leur proposer le véhicule le plus adapté et les accompagner vers l’autonomie. « Je fais un diagnostic de mobilité selon la zone géographique du bénéficiaire, son âge, ses horaires de travail, etc. (…) Notre enjeu, c’est le maintien à l’emploi », assure-t-il.

Pour les bénéficiaires, ces voitures de seconde main sont louées à 7 euros par jour (5 euros pour les bénéficiaires du RSA). « Avec des loueurs classiques, la caution c’est souvent 1 000 euros et le prix de la location est trop élevé… Je devais trouver une solution rapide pour reprendre le travail », partage Leïla, bénéficiaire du service. Pour un mois de location, Leïla paye 210 euros et ses chèques de caution ne sont pas encaissés. Avec un loueur classique, elle aurait dû compter au moins 100 euros de plus pour la location et avancer le montant de la caution : « Cette solution me sauve. Ça me donne le temps d’économiser pour acheter une voiture », explique-t-elle.

Les associations labellisées par la plateforme donnezvotrevoiture.org fournissent aux donateurs un reçu fiscal d’un montant équivalent à la valeur estimée du véhicule. « J’ai été étonnée, partage Nadine, la donatrice de Gap. J’ai eu un reçu fiscal de 1 540 euros, je ne pensais pas que ma voiture valait tant que ça ! J’avais vu sur le site qu’il y avait un reçu fiscal, mais ce n’est pas ce qui m’a motivée à donner ma voiture car je pensais qu’il serait de 200 ou 300 euros maximum. »

Contrairement à Nadine qui n'a jamais envisagé de vendre sa vieille Seat, beaucoup de donateurs se tournent dans un premier temps vers la vente d’occasion. « Mais il faut rencontrer les acheteurs potentiels, négocier le prix, passer le véhicule au contrôle technique… Finalement, le don est une bonne alternative à la vente, qui évite tous ces tracas et permet d’obtenir un reçu fiscal, estime Hocine Reguida. D’autant que certains donateurs ont des véhicules qui ne sont pas présentables à la vente. Mais nous, on ne prête pas attention à l’esthétique ! L’essentiel est que la voiture permette à nos bénéficiaires de rouler en toute sécurité », conclut-il.

À peine deux mois après son don, la voiture de Nadine a déjà pu bénéficier à une aide-soignante pour ses tournées de soins à domicile. Et ce n’est que le début de sa nouvelle vie ! Vous avez une voiture qui ne vous sert plus et dont vous ne savez pas quoi faire ? Comme Nadine, pensez au don et donnez-lui une nouvelle vie solidaire.