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L’hydrogène, l’avenir du sport auto ? Rencontre avec l’équipe de MissionH24

Par Florence Martin

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Sur le mythique circuit du Castellet, nous avons rencontré deux jeunes ingénieurs du programme MissionH24, qui nous ont présenté les deux prototypes à propulsion électrique-hydrogène du programme : la LMPH2G et la nouvelle H24. Ils ont répondu à toutes nos questions sur ces impressionnants bolides et leur technologie. Plein phare sur MissionH24, un programme pionnier, véritable laboratoire pour la décarbonation de la mobilité forte puissance-longue distance.

En 2018, l’Automobile Club de l’Ouest (ACO) et GreenGT, une entreprise indépendante active dans les technologies électriques-hydrogène, décident de lancer un programme de développement d’un véhicule de compétition à propulsion électrique-hydrogène par pile à combustible, taillé pour l’endurance. Depuis, les prototypes ont enchaîné les premières. Jusqu’au centenaire des 24 Heures du Mans le 11 juin 2023, où le pilote Stéphane Richelmi a effectué un tour d’honneur au volant de la H24, quelques minutes avant que ne s’élancent les concurrents de la plus célèbre épreuve d’endurance du monde. En attendant la catégorie dédiée !

Ce n’est pas au Mans mais au Castellet, à quelques kilomètres des locaux de MissionH24 à Signes (Var), que nous avons eu la chance de nous entretenir avec Antoine Larroque, Performance Engineer et team leader du programme, et Antoine Onillon, responsable exploitation power et systèmes embarqués. Une interview à découvrir ci-dessous et en vidéo, pour vivre les mêmes sensations fortes que Maxime, notre cadreur-monteur !

Comment fonctionne une voiture à hydrogène ?

Antoine Larroque : Dans notre cas, on a une voiture à pile à combustible. Donc on stocke de l'hydrogène sous forme de gaz dans des réservoirs, et on a un compresseur qui vient tirer de l'air. Dans la pile à combustible, l'oxygène et l'hydrogène vont venir se rencontrer et avec une réaction chimique, cela va produire de l'électricité, qui va être récupérée pour alimenter les moteurs électriques. Cela va aussi produire de l'eau qui va être rejetée et de la chaleur, qui va se dissiper. C'est aussi simple que ça.

La voiture à hydrogène n'émet que de l'eau en roulant.
La voiture à hydrogène n'émet que de l'eau en roulant.

En quoi cette voiture de course est-elle différente d’une voiture à hydrogène classique ?

Antoine Larroque : Elle utilise la même technologie que les voitures à hydrogène qui existent déjà sur le marché, comme la Toyota Mirai : une pile à combustible. La différence, c'est qu'on a tout poussé à l'extrême pour la course, pour en tirer le maximum de performances possibles et donc pour aller le plus vite et le plus longtemps possible. On a une voiture qui peut rouler vite, longtemps, sur des circuits contraignants, alors que sur la route, on est sur des allures normales, pas vraiment contraignantes pour les systèmes. Notre but à nous, c'est vraiment d'éprouver la technologie sur cette voiture pour la rendre plus fiable et plus performante.

La course d’endurance est une application concrète et particulièrement pertinente de l’hydrogène. Pourquoi ?

Antoine Onillon : L'hydrogène est pertinent en course automobile, notamment pour l'endurance, parce qu'on a des temps de recharge vraiment réduits. On peut s'arrêter et « refueler » la voiture en trois à cinq minutes, comme pour une voiture thermique. Ça nous permet d'avoir de fortes puissances. Sur notre voiture, on est à 550 kW, ce qui correspond à quasiment 750 chevaux.

Antoine Larroque : Dans la course d'endurance, on doit tenir plus longtemps que par exemple sur une course de formula E. On doit faire des sessions de roulage de 40 minutes à chaque fois (c'est dix tours aux 24 Heures du Mans en général pour une voiture thermique par exemple). Cette technologie-là se prête vraiment à ce type de course, parce qu’on peut faire 40 minutes avec le plein et ensuite on peut faire un rechargement. C’est comme recharger une voiture avec de l'essence, c'est le même geste, avec un pistolet. Ça prend un peu plus de trois minutes alors qu'avec une batterie, on va être obligé de la recharger longtemps et on n'aura pas la même autonomie.

Quelle est l’ambition de MissionH24 ?

Antoine Onillon : Avec Mission H24, ont veut montrer que l'hydrogène est une technologie qui peut être utilisée en course automobile, et notamment en endurance. Et le but, c'est de lancer une nouvelle catégorie en endurance pour les 24 Heures du Mans à l'horizon 2025-2026.

En quoi votre travail chez Mission H24 sert-il la technologie hydrogène ?

Antoine Onillon : Il sert au développement de la technologie de pile à combustible qui est utilisée à l'intérieur, mais aussi au développement de toutes les infrastructures autour. Pour faire venir la voiture sur une course par exemple, il faut aussi être en mesure de la recharger. Pour ça, on a une station de rechargement mobile qui vient avec nous sur les circuits. Donc il y a énormément de développement côté stations et sur la voiture. Les développements que l'on fait sont aussi utilisés et appliqués sur d’autres projets qu'on a en cours, par exemple de camions à hydrogène. Et on développe aussi tout ce qui est réglementation concernant la course automobile, avec la FIA* par exemple. Tout ce qui est développé actuellement en course automobile en termes de réglementation va aussi être appliqué aux véhicules de route dans le futur, pour tout ce qui est sécurité autour de l'hydrogène.

A quels types de véhicules s’adresse l’hydrogène aujourd’hui ?

Antoine Onillon : L'hydrogène s'adresse particulièrement aux mobilités lourdes comme les véhicules commerciaux, les bateaux ou l'aviation par exemple. Il a un avantage, c'est qu'on peut rapidement recharger le véhicule en hydrogène et il nous permet d'avoir de très fortes puissances pour des camions, des bus, par exemple. C'est vraiment adapté à cet usage-là. Et ce sont d'ailleurs les premiers développements qui ont commencé pour des véhicules de tous les jours.

Quelles sont les limites de l'hydrogène aujourd'hui ?

Antoine Larroque : Je pense qu'il y en a beaucoup dans le quotidien aujourd'hui, parce que c'est une technologie qui est nouvelle et que les infrastructures n'existent pas. Il faut le temps que tout se mette en place, que tous les pays investissent dans des stations et qu'on réfléchisse vraiment à une solution pour produire l'hydrogène de façon verte. Le but, c'est d’avoir du zéro émission sur toute la chaine, de la production jusqu'à la consommation.

* FIA : Fédération internationale de l'automobile.