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Le covoiturage n’est pas suffisant pour décarboner la mobilité des Français : vrai ou faux ?

Par Eva Gomez

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À l’horizon 2050, la France s’est engagée à atteindre la neutralité carbone. La voiture individuelle étant le principal poste d'émissions de carbone, il faudra miser sur différents leviers pour réduire drastiquement ces émissions. Le covoiturage constitue-t-il un levier suffisant ? Un expert nous répond.

Le covoiturage est un levier intéressant pour la décarbonation des mobilités, mais il peut pas être la seule solution. ©iStock

Quand on pense à la décarbonation de la mobilité automobile, on pense en priorité à la voiture électrique, qui n’émet aucun CO2 à l’usage. Mais l’électrification du parc auto n'est pas le seul levier existant pour diminuer efficacement les émissions de carbone liées à la mobilité des personnes ! « En fait, tous les scénarios montrent que l’on a besoin de l’ensemble des leviers, même les scénarios les plus technophiles [scénarios qui prônent l’électrification massive des véhicules, Ndlr]. Et tous les scénarios ont besoin de travailler sur les autres facteurs de décarbonation de la mobilité automobile, qui sont : réduire les distances, basculer vers des transports collectifs ou la mobilité active, et augmenter le taux d’occupation », explique Thomas Matagne, président fondateur de l’opérateur de lignes de covoiturage Ecov. Le covoiturage est l’une des solutions les plus efficaces pour augmenter le taux d’occupation, mais il n’est donc pas suffisant pour, à lui seul, décarboner la mobilité automobile des Français. « Non le covoiturage n’est pas suffisant, mais aucun levier ne l’est », confirme Thomas Matagne.

Diminuer le trafic et les émissions de CO2

Néanmoins, l'impact potentiel du covoiturage sur le taux d’occupation est loin d’être négligeable et ce facteur représente une vraie opportunité pour la décarbonation. Le taux d’occupation moyen actuel est en effet de 1,4, ce qui revient à dire que 10 voitures transportent en moyenne 14 personnes : 10 conducteurs et 4 passagers. En partant du principe que ces 10 voitures possèdent au minimum 4 places assises chacune, il reste au moins 26 sièges inoccupés ! Ces sièges vides sont une opportunité de diminuer le nombre de voitures en circulation sur les routes et ainsi de réduire massivement les émissions de CO2 dues au trafic automobile. En 2021, les voitures particulières représentaient en effet 53% des émissions du secteur des transports, qui représente lui-même environ 30% des émissions de CO2 du pays. (données notre-environnement.gouv.fr)

Bon à savoir

Selon le baromètre 2024 de l’autosolisme de Vinci, 83,8% des Français circulent seuls au volant de leur voiture le matin aux heures de pointe.

Si, à l’échelle de l’Europe, (…) on passait d’un taux d’occupation de 1,4 en moyenne à 1,8, cela permettrait d’éviter (…) le besoin d’achat de 70 millions de véhicules électriques.

Thomas Matagne,
fondateur d’Ecov

Le covoiturage : une opportunité économique

L’augmentation du taux d’occupation est donc un levier de taille pour diminuer l’impact carbone du transport routier, avant même de considérer le remplacement des voitures thermiques par des voitures électriques. Ces dernières, très coûteuses à l’achat, restent encore inaccessibles pour de nombreux Français, avec un marché de l’occasion électrique qui n’en est qu’à ses prémices. Par ailleurs, il n’est ni souhaitable, ni même possible pour des questions de ressources, de remplacer les 39 millions de voitures thermiques qui circulent aujourd’hui en France par 39 millions de voitures électriques, ce qui prêche pour plus de sobriété dans notre mobilité. « La Stratégie nationale bas carbone (SNBC) misait beaucoup, jusqu’à présent, sur la technologie et donc l’électrification. Or, maintenant il est acté qu’on n’électrifiera pas tous les véhicules thermiques », souligne Thomas Matagne. « Si, à l’échelle de l’Europe, pour les trajets du quotidien uniquement, on passait d’un taux d’occupation de 1,4 en moyenne à 1,8, cela permettrait d’éviter – pour la même réduction d’émissions carbone – le besoin d’achat de 70 millions de véhicules électriques », poursuit-il. « 70 millions de véhicules électriques, ça coûte à peu près 2 000 milliards d’euros, soit le PIB de la France : c’est colossal ! En France, on n’a pas de pétrole mais on a des sièges libres et c’est une véritable richesse », estime Thomas Matagne.

Construire un système global

Une richesse qu’il suffirait donc d’exploiter en créant un cadre global qui permette d’actionner sérieusement le levier du covoiturage. « Ce n’est pas juste des solutions numériques, ni juste des aires de covoiturage… C’est un système qui permet aux gens de covoiturer de façon efficace pour augmenter structurellement le taux d’occupation et faire de la voiture un transport collectif », conclut le fondateur d’Ecov.